TESTO DEL LIED

"À une fleur"
di Louis Charles Alfred de Musset (1810-1857)

Que me veux-tu, chère fleurette,
Aimable et charmant souvenir?
Demi-morte et demi-coquette,
Jusqu'à moi qui te fait venir?
Sous ce cachet enveloppé,
Tu viens de faire un long chemin.
Qu'as-tu vu? que t'a dit la main
Qui sur le buisson t'a coupée?
N'es-tu qu'une herbe desséchée
Qui vient achever de mourir?
Ou ton sein, prêt à refleurir,
Renferme-t-il une pensée?

Ta fleur, hélas! a la blancheur
De la désolante innocence;
Mais de la craintive espérance
Ta feuille porte la couleur.
As-tu pour moi quelque message?
Tu peux parler, je suis discret.
Ta verdure est-elle un secret?
Ton parfum est-il un langage?

S'il en est ainsi, parle bas,
Mystérieuse messagère;
S'il n'en est rien, ne réponds pas;
Dors sur mon coeur, fraîche et légère.

Je connais trop bien cette main,
Pleine de grâce et de caprice,
Qui d'un brin de fil souple et fin
A noué ton pâle calice.
Cette main là, petite fleur,
Ni Phidias ni Praxitèle
N'en auraient pu trouver la soeur
Qu'en prenant Vénus pour modèle.
Elle est blanche, elle est douce et belle,
Franche, dit-on, et plus encor;
A qui saurait s'emparer d'elle
Elle peut ouvrir un trésor.
Mais elle est sage, elle est sévère;
Quelque mal pourrait m'arriver.
Fleurette, craignons sa colère,
Ne dis rien, laisse-moi rêver.